18. 09. 2025

Les TP – une composante clé de l’économie suisse

Avec plus de 90 000 postes à temps plein et une valeur ajoutée de 17,5 milliards de francs, les entreprises de transport public, y compris le secteur ferroviaire, revêtent une importance économique considérable pour la Suisse. Telle est la conclusion d’une étude menée par le bureau de conseil INFRAS pour le compte de la LITRA et de Swissrail.

Les TP suisses ne se contentent pas simplement de transporter des millions de personnes, ils représentent en outre un employeur majeur et jouent un rôle économique prépondérant. © SOB

Par Benedikt Vogel, auteur indépendant

La contribution sociétale des transports publics réside avant tout dans leurs prestations de transport : chaque jour, les trains, les bus et les trams conduisent efficacement des millions de passagers vers leur lieu de destination, qu’il soit professionnel ou privé.

Il est toutefois aussi légitime d’examiner leur contribution à la société sous un angle économique et de se poser la question de quelle manière les TP contribuent à l’économie nationale. Cette question constitue le point de départ d’une étude réalisée par l’INFRAS à la demande de la LITRA et de l’association faîtière Swissrail.

La contribution, mesurée à la valeur ajoutée

Pour quantifier la contribution à l’économie nationale, les économistes se basent sur la valeur ajoutée1, c’est-à-dire, plus simplement, sur le revenu généré par une entreprise ou un secteur d'activité. L’étude de l’INFRAS estime la valeur ajoutée des entreprises de transports publics à environ 9,1 milliards de francs pour l’année 2024.

« Cela met en lumière l’importance des TP suisses pour notre économie et notre prospérité », souligne Martin Candinas, président de la LITRA. « Nous parlons aujourd’hui souvent de ce que nous coûtent les TP, mais bien trop rarement de ce qu’ils apportent réellement à la Suisse, non seulement en matière de prestations de transport, mais également au niveau de notre économie et de notre prospérité. »

Sur ce plan, les TP ont effectivement beaucoup à offrir : si l’on considère la valeur ajoutée générée par les entreprises de transport à elles seules, l’importance économique de la branche des TP dépasse largement celle d’autres secteurs suisses de premier ordre, tels que les télécommunications.

En 2024, les transports publics et le secteur ferroviaire suisse ont généré un chiffre d’affaires de 21,1 milliards de francs et une valeur ajoutée de 17,5 milliards de francs. La majeure partie revient aux prestations des TP, qui ont dégagé une valeur ajoutée de 12,4 milliards de francs. Par prestations des TP, nous entendons toutes les prestations routières et ferroviaires de transport et d’exploitation dans le domaine des transports publics. © LITRA

Si l’on ajoute à cette valeur ajoutée celle générée par les fournisseurs qui approvisionnent les entreprises de transport en matériel de bureau, en prestations de nettoyage et autres, elle atteint même 12,4 milliards de francs.

Pour obtenir une vue d’ensemble exhaustive de la contribution à l’économie nationale de la branche des TP, il convient en outre de prendre en compte les entreprises qui fournissent des biens d’équipement (par exemple du matériel roulant) aux entreprises de transport, ainsi que l’ensemble des exportations de biens et de services à l’étranger. Dans ce contexte, la valeur ajoutée s’élève à quelque 17,5 milliards de francs.

Un secteur qui crée et garantit des emplois

L’importance économique du secteur des TP devient encore plus évidente lorsque l’on se penche sur la question de l’emploi : plus de 100 000 personnes travaillaient dans le domaine des transports publics en 2024, ce qui correspond à 92 600 emplois à temps plein. Le secteur des TP joue donc un rôle quasiment équivalent à celui de la branche de la formation en Suisse.

En 2024, le secteur des TP a fourni environ 92 600 emplois à temps plein. Ce dernier occupe de manière directe 62 800 personnes à temps plein, ce qui équivaut à peu près au nombre d’emplois créés par le secteur de l’éducation et de la formation, qui en compte 66 000 à temps plein. Le secteur des TP constitue ainsi un employeur essentiel pour la Suisse. © LITRA

Les transports publics sont connus pour leurs investissements conséquents. Ces dépenses sont capitales pour le marché du travail. D’un point de vue purement mathématique, un million investi dans les transports publics génère quatre emplois à temps plein.

Les investissements dans les infrastructures occupent ici une place particulièrement importante : selon l’analyse de l’INFRAS, ceux-ci (par ex., dans les gares, les ateliers ou encore dans la construction de voies ferrées) génèrent trois fois plus de valeur ajoutée que les investissements dans les véhicules.

Une exportation sous-estimée

Swissrail, l’association professionnelle de l’industrie suisse du rail et de la mobilité, dénombre 160 membres, ce qui correspond à 11 000 emplois à temps plein. Un grand nombre des entreprises membres de Swissrail ne produisent pas uniquement pour le marché suisse, mais commercialisent également leurs biens et services à l’étranger.

D’après les conclusions d’une enquête menée par l’équipe de recherche auprès d’entreprises sélectionnées, en partant du chiffre d’affaires, environ 30 % de la production du secteur ferroviaire suisse, soit quelque 3,4 milliards de francs, sont exportés. Ces exportations génèrent une valeur ajoutée de 700 millions de francs.

« Les entreprises se doivent également de performer à l’étranger si nous voulons qu’elles assurent le succès du secteur ferroviaire suisse dans le domaine des TP. Plus de 95 % de nos membres réalisent des exportations », fait remarquer Andreas Haas, directeur de Swissrail. La petite taille du marché intérieur oblige le secteur à concevoir ses produits et ses systèmes à l’échelle internationale dès le départ. Faire du marché d’exportation une priorité n’est pas seulement une nécessité économique, mais un bénéfice certain pour l’économie nationale suisse.

Environ un tiers du chiffre d’affaires de la branche, soit près de 1,1 milliard de francs, provient des exportations. Celles-ci créent une valeur ajoutée de 700 millions de francs et contribuent ainsi directement au renforcement de la prospérité suisse. Le secteur ferroviaire joue de ce fait un rôle stratégique majeur : grâce à ses produits innovants, à ses compétences solides en matière de systèmes et à la demande internationale, elle garantit des emplois et affirme la position de la Suisse en tant que fournisseur de solutions de transport durables sur le marché mondial.

L’exportation est donc bien plus qu’une activité annexe : elle est la condition sine qua non pour que le secteur ferroviaire puisse libérer son potentiel d’innovation tout en contribuant de manière significative à la prospérité de la Suisse.

La pandémie est derrière nous

Cette étude sur la contribution à l’économie nationale des TP vient actualiser les données collectées en 2018 et 2020. Les chiffres obtenus révèlent notamment que le secteur des TP a désormais surmonté le creux économique causé par la pandémie de COVID-19 en 2020 et 2021.

En 2024, la valeur ajoutée et le nombre d’emplois générés par les entreprises de transport ont de nouveau dépassé les chiffres de 2018. Au regard du volume de leurs livraisons à la branche des TP, ce constat vaut également pour les fournisseurs et les producteurs de biens d’équipement. Dans le domaine de l’exportation, la valeur ajoutée et la quantité d’emplois sont sensiblement restées au même niveau entre 2018 et 2024.

Les investissements dans les infrastructures de transport public génèrent une valeur ajoutée trois fois supérieure à celle des investissements dans les véhicules : chaque million investi dans la construction d’infrastructures produit une valeur ajoutée de 0,75 million de francs, contre environ 0,1 million de francs pour les investissements dans les véhicules. Sont considérées comme des investissements dans les TP toutes les dépenses des entreprises de transport consacrées à des biens d’équipement tels que la construction de voies ferrées, de gares, de dépôts ou d’ateliers, ou l’achat de bus et de matériel roulant. © LITRA

L’étude se consacre également à la question de la durabilité et vient corroborer les avantages bien connus des transports publics. Les voyageurs en train ne produisent que 2 % des émissions de gaz à effet de serre générées par un vol sur la même distance. En ce qui concerne les coûts externes, c’est-à-dire les émissions de polluants atmosphériques ou encore les atteintes au sol, au paysage ou au climat, c’est en particulier le tram qui obtient de très bons résultats. Le rail compte cependant lui aussi parmi les moyens de transport dont les coûts externes sont les plus bas, avec environ cinq centimes par passager-kilomètre.

Les coûts externes sont légèrement plus élevés du côté des trolleybus, mais ce sont avant tout ceux des bus diesel qui, avec près de 20 centimes par passager-kilomètre, pèsent le plus lourd, notamment en raison de leurs émissions de polluants atmosphériques importantes. Les trains de marchandises obtiennent quant à eux de bien meilleurs résultats en matière de coûts externes que les camions, les semi-remorques et les avions.

Le rail, qu’il s’agisse du transport de passagers ou de marchandises, est de loin le mode de transport qui émet le moins de gaz à effet de serre. Un passager-kilomètre parcouru en train ne génère en effet que 2 % des émissions de gaz à effet de serre d’un passager-kilomètre parcouru en avion. Un passager-kilomètre parcouru en voiture avec un moteur à combustion classique génère quant à lui cinq fois plus d’émissions de gaz à effet de serre qu’un bus électrique moderne. © LITRA

Recherche et développement pour une plus grande efficacité énergétique

Les dépenses en recherche et développement (R&D) constituent un indicateur clé de la capacité d’innovation d’une entreprise ou d’une branche. Les entreprises de transport interrogées par l’INFRAS ont déclaré consacrer en moyenne environ 3 % de leur chiffre d’affaires à des projets de R&D. Ces montants sont par exemple investis dans des motorisations alternatives, des systèmes d’aide à la conduite, de nouvelles plateformes de véhicules, des logiciels innovants ou encore des technologies de signalisation modernes.

L’Office fédéral des transports (OFT) a financé l’an dernier des activités de R&D axées sur la pratique à hauteur de 3,5 millions de francs. Combinées aux fonds propres des entreprises, ces activités ont représenté un volume total d’environ 12 millions de francs. Le plus grand nombre de demandes de subventions de recherche auprès de l’OFT a été déposé par les chemins de fer. Ces chiffres ne comprennent toutefois pas par exemple les 300 000 francs que le Fonds de recherche des CFF 2024 a alloués à la recherche fondamentale.


1Valeur ajoutée

La valeur ajoutée est une grandeur utilisée par les économistes pour quantifier la contribution d’une entreprise à la société. Elle comprend les salaires versés par une entreprise à ses employés ainsi que les impôts versés à l’État. Elle comprend en outre les bénéfices qui reviennent à l’entreprise, aux employés ou aux actionnaires, mais aussi les amortissements et les coûts du capital, dont profitent à terme les fabricants de biens d’équipement et les banques.

La valeur ajoutée d’une entreprise est calculée en déduisant les consommations intermédiaires (dépenses nécessaires à l’exploitation) du chiffre d’affaires (somme de toutes les ventes). Lorsque l’on additionne la valeur ajoutée de toutes les entreprises d’une branche, on obtient un chiffre qui permet de quantifier la contribution de cette branche à l’économie nationale. La somme de la valeur ajoutée de toutes les entreprises d’un pays correspond au produit intérieur brut, ou PIB. En 2024, la branche des TP a contribué à hauteur d’environ 1,2 % au PIB suisse.